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Ouverture du discount Atacadao en France : une « arme anti-inflation » ou « pro-bénéfices » ?
La marque Carrefour lance un nouveau type de discount sur le territoire français, avec un choix réduit et des prix cassés : mais les promesses de cette multinationale de la grande distribution seront-elles à la hauteur des attentes et des besoins des consommateurs ?
Annoncé dès octobre 2022 par le PDG de Carrefour, le premier magasin ATACADAO en France a ouvert ses portes le 20 juin dernier à Aulnay-Sous-Bois, en Seine-Sain-Denis (93).
ATACADAO, ce nom ne vous dit peut-être pas grand-chose, mais vous serez certainement amené à l’entendre de plus en plus. Rachetée en 2007 par le groupe Carrefour, cette entreprise brésilienne, qui dispose de 300 magasins au Brésil, vend des produits de consommation courante à des prix cassés, grâce à un concept de « magasin-entrepôt » où les produits sont directement stockés dans les rayons et où le client se sert dans les cartons. Ces magasins incitent les consommateurs à acheter en gros, car le prix est dégressif en fonction de la quantité achetée : des produits comme le sucre, la farine, le riz, peuvent ainsi s’acheter par paquets de 10 ou 20 kg, à des prix défiant – en théorie – toute concurrence.
En France, le concept a pris du temps à se concrétiser : d’abord prévu à Sevran, qui a refusé l’implantation du magasin sur son territoire, le magasin a finalement été accueilli par la ville d’Aulnay-Sous-Bois, en lieu et place d’un ancien hypermarché Carrefour. Le jour de l’ouverture, des clients ont fait le déplacement des communes de Seine-Saint-Denis avoisinantes, et même du Val-d’Oise pour tester le concept et profiter de promotions. Cependant, les avis sont mitigés. Si des clients se réjouissent de profiter des prix dégressifs en quantité, notamment pour subvenir aux besoins de familles nombreuses, d’autres pointent du doigt une différence de prix parfois minime avec d’autres enseignes, surtout si ces produits sont achetés en faible quantité. L’aspect « entrepôt » et les larges allées sans signalétique peuvent aussi confondre certains visiteurs. Enfin, l’un des clients interrogés par Le Parisien souligne que tout est fait pour pousser à la surconsommation, en particulier de produits sucrés et caloriques.
Un discount très lucratif
En effet, on peut s’interroger sur l’intention de ce genre de magasins. Derrière la façade d’un discount « anti-crise » qui profiterait aux populations les plus précaires, se profile une stratégie très rentable pour Carrefour, visant à accroître encore davantage son chiffre d’affaires. Au Brésil, l’enseigne représente les deux tiers du chiffre d’affaires de Carrefour et 80% de sa rentabilité. En France, le magasin s’adresse à la fois aux professionnels, en ouvrant dès 7 heures, mais également aux particuliers, que l’enseigne compte attirer pour en faire 70% de son chiffre d’affaires. Cette double casquette lucrative ne profite cependant pas aux salariés de l’entreprise. Pour faire fonctionner le magasin d’Aulnay-Sous-Bois, ils sont 220, un tiers de moins qu’à l’époque de l’hypermarché Carrefour. Un plan de départ volontaire a écrémé l’équipe de 96 salariés. On peut donc supposer, pour les salariés restants, un travail plus pénible et plus précaire, sur une surface immense de 10 000 m². Cela fait écho aux conditions de travail dégradées dans d’autres discounts, comme la franchise Action, qui avait déjà fait l’objet d’une enquête en 2024.
Qui plus est, la promotion des lots de 10 ou 20 produits similaires incite surtout les clients à consommer plus que ce dont ils ont besoin, et la différence de prix passe au second plan. Certains produits, comme l’eau gazeuse de marque par exemple, sont même vendus plus chers que dans des enseignes voisines, comme Auchan ou Leclerc. Plus qu’un « coup de pouce » financier, il s’agit bien de faire acheter beaucoup, et pas toujours de la meilleure qualité, à des populations précaires qui espèrent trouver une marge de dizaines de centimes sur leurs achats. Nous sommes loin d’un projet philanthrope, et plus près d’une manne financière qui repose sur des consommateurs plus vulnérables. Ça n’est d’ailleurs pas un hasard si le magasin ouvre à Aulnay-Sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, et non dans les banlieues plus aisées d’Île-de-France.
La direction de Carrefour a annoncé tester dans un premier temps le concept avant d’envisager, en cas de succès, l’ouverture de nouveaux points de vente à travers la France. Nous espérons néanmoins que cette expansion ne se fera pas aux dépens d’un salariat plus précarisé et de consommateurs moins bien informés sur ce qu’ils achètent.
Ndlr : Le titre reprend les propos du PDG de Carrrefour Alexandre Bompard, qui a parlé d'Atacadao comme d'"arme anti-inflation" lors de l’inauguration du projet en 2022. Source : lsa-conso.fr
Un million de bénéficiaires potentiellement exclus du chèque énergie par l’État !
[Communiqué de Presse]
Après l’annonce d’une augmentation de près de 10% des prix de l’électricité résultant de la sortie progressive du bouclier tarifaire, le gouvernement envisage désormais d’exclure potentiellement près d’un million de bénéficiaires du chèque énergie alors qu’ils remplissent les critères pour l’obtenir. Les signataires de ce communiqué (ADEIC – AFOC – Association Léo Lagrange Pour la défense des Consommateurs – AUE – CGL – CLCV – CNAFAL – CNAFC – CNL – CSF – Familles Rurales – Familles de France – Secours Catholique – UFC-Que Choisir – UNAF) dénoncent une véritable inégalité d’accès à l’aide publique en raison d’une carence de l’administration. C’est d’autant moins acceptable que le montant de ce chèque couvre à peine l’augmentation des taxes imposées par le gouvernement aux tarifs de l’énergie.
Les nouveaux ayants droit au chèque énergie risquent de ne pas recevoir de chèque en 2024, et de ne pas bénéficier des protections associées, parmi lesquelles l’interdiction de réduction de puissance électrique pendant la trêve hivernale (entre le 1er novembre 2024 et le 31 mars 2025).
Un projet de décret mis en consultation au Conseil Supérieur de l’Energie indique que seuls les bénéficiaires de ce dispositif en 2023 recevraient un chèque du même montant en 2024, sur la base de leur revenu fiscal de référence de 2021. La disparition progressive de la Taxe d’Habitation, annoncée il y a 4 ans, est la cause de l’impasse dans laquelle se trouvent les services fiscaux pour identifier les occupants d’un même foyer et calculer le nombre d’unités de consommation (avec un plafond de 11 000 euros par unité de consommation).
La DGEC estime que chaque année, 1 million de ménages accèdent pour la première fois au bénéfice du chèque énergie. Les laisser à la porte alors que leurs revenus correspondent au critère d’éligibilité est inacceptable et scandaleux. C’est incompréhensible, alors que les tarifs réglementés de vente d’électricité ont augmenté de 39% depuis début 2023, que la sortie progressive du bouclier tarifaire génère une augmentation du prix de l’électricité de 10% depuis le 1er février 2024, que la taxe sur le gaz (TICGN) vient de passer de 8 à 16%, que le tarif d’acheminement du gaz va majorer la facture de chauffage de 5,5% et que celui de l’électricité augmentera très probablement dans le même ordre de grandeur dans les prochains mois. Permettre aux ménages répondant au critère de ressources inscrit dans la loi d’accéder au chèque énergie 2024 est une exigence. Il est possible à titre dérogatoire, et en l’attente d’un dispositif pérenne, de l’attribuer à ce million de ménages qui peut y prétendre sur la seule base du revenu fiscal de référence 2022, en prenant en compte les parts fiscales déclarées. Le budget nécessaire est estimé à environ 500 millions d’euros à partir des évaluations communiquées par la DGEC, c’est un enjeu majeur de justice sociale, l’égalité d’accès aux aides publiques doit prévaloir.
Les milliards d’euros perçus via l’augmentation des taxes sur les factures d’électricité depuis le 1er février absorberont à eux seuls et très largement cette aide sans laquelle un million de nos concitoyens plongeront encore un peu plus dans une précarité inacceptable. L’hiver dernier, 26% des ménages déclaraient avoir souffert du froid chez eux, selon le Médiateur National de l’Énergie. Combien seront-ils l’an prochain ?
La balle est dans le camp du Ministre de l’Économie en charge de l’Énergie pour mettre fin à la situation ubuesque proposée par l’administration.
Depuis quelques années, de plus en plus de voix s’élèvent pour demander une réévaluation significative du montant du chèque énergie et de son assiette fiscale, qui n’ont pas évolué depuis 2019, malgré la forte augmentation des prix de l’énergie. D’un montant compris entre 48 et 277 euros, en moyenne de 150 euros, ce dispositif bénéficie chaque année à environ 5,6 millions de foyers modestes. L’augmentation du coût de l’électricité en février 2024 est évaluée par le Ministère de l’Économie et des Finances, pour une maison de 4 personnes chauffées à l’électricité, à 213 euros, et à 91 euros avec un chauffage au gaz (auxquels viennent s’ajouter 112 euros liés à la hausse de la TICGN). Le chèque énergie 2023 ne compensera donc même pas les augmentations de l’année…
Contacts :
Françoise Thiebault (CNAFAL) : 06 80 10 83 64
Jean-Yves Mano (CLCV) : 06 81 99 31 50
Niki Vouzas (Familles Rurales) : 06 49 49 75 17